Action 101
Action # 101 — 24 octobre 2024 — Des Zéromachas interpellent les hommes
Les accusés de Mazan sont-ils des « Monsieur tout le monde » ?
Pourquoi dire et répéter que les accusés de Mazan sont des « Monsieur tout le monde », comme si leur diversité d’âges et de professions le démontrait ? Est-ce pour nous faire croire que tous les hommes pourraient commettre de tels crimes, que n’importe quel homme pourrait pénétrer sans scrupules une femme inconsciente, puisque « son mari est d’accord » ?
Certes, les accusés de Mazan sont parmi nous, insérés dans la société. Ils ne sont donc pas des « monstres », comme on disait autrefois, même si leurs actes peuvent être qualifiés de monstrueux. Néanmoins, les qualifier de « Monsieur tout le monde », c’est manquer de nuances, ce qui nuit tout autant aux hommes qu’aux femmes.
Non, tous les hommes ne croient pas que le corps d’une femme appartient à son mari. Non, tous les hommes ne sont pas excités sexuellement par une femme inconsciente. Non, les accusés de Mazan ne sont pas des « Monsieur tout le monde », au sens où ils seraient des hommes ordinaires, banals, comme des millions d’autres en France.
Cette image du violeur « Monsieur tout le monde » a été utile à la génération précédente. Elle a aidé à dissiper le mythe du violeur inconnu agressant une femme, la nuit, sur un parking. Elle a fait prendre conscience que la très grande majorité des viols sont commis par un homme connu de la victime, un membre de sa famille ou de son entourage.
Après ces deux images opposées et également fausses, faisons face à une réalité plus complexe ! Les accusés de Mazan ont, certes, des métiers et des âges variés, on peut donc dire qu’ils sont « ordinaires », mais ceci n’est qu’un constat sociologique. Ils vivent, comme nous tous et toutes, dans un système patriarcal qui déshumanise les femmes et les réduit à l’état d’objet. Un système où le corps des femmes est traité comme une chose — dans le viol — ou comme une marchandise — dans la prostitution et la porno-industrie. Comme chacun·e d’entre nous, ils ont baigné, dès leur plus jeune âge, dans la culture du viol, et ils n’ont pas voulu s’en affranchir.
D’autres hommes — une minorité — considèrent les femmes, toutes les femmes, comme leurs égales : c’est le cas des milliers d’hommes qui, depuis 2011, ont signé le manifeste de Zéromacho. Néanmoins, ils sont trop peu nombreux à s’engager contre les violences machistes et pour l’égalité.
Ceux qui protestent en disant « Pas tous les hommes ! » pourraient aller plus loin : dire non au viol, non à la prostitution, non à la porno-industrie. Non à une culture où les femmes sont vues comme des objets sexuels, et non comme des sujets de leur sexualité, où la sexualité est utilisée pour souiller les femmes. Non à l’idée que les hommes auraient des « besoins » que des femmes devraient satisfaire.
Nous invitons ces hommes à agir publiquement, à soutenir financièrement les associations d’aide aux femmes victimes de violences, et à s’engager collectivement pour que la sexualité soit la rencontre, entre adultes, de désirs réciproques.
Pilar Aguilar, Marie-Noëlle Bas, Chantal Charpenet, Patricia Chaumet, Sylvie Debras, Blandine Deverlanges, Claire Donzel, Corinne Guyonnet, Regan Kramer, Ariane Kuttel, Claudine Legardinier, Hélène Lorraine, Florence Montreynaud, Véronique Perrais-Philippe, Gudrun Renberg et Agnès Setton, Zéromachas — des femmes qui incitent les hommes à s’engager contre le système proxénète et pour l’égalité femmes-hommes