Lettre ouverte d’un collectif d’hommes interpellant les députés français à l’occasion du vote le 6 décembre 2011 par l’Assemblée nationale de la résolution contre la prostitution
Mesdames, Messieurs,
En 2001, la sénatrice Dinah Derycke et la députée Christine Lazerges vous ont soumis deux rapports de grande qualité demandant une politique plus volontariste contre la prostitution. Dix ans après, le rapport Bousquet-Geoffroy conduit aux mêmes conclusions, et estime urgent de dénormaliser la prostitution, car :
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- Il s’agit d’un rapport inégal entre deux personnes.
- Il s’agit d’une violence que la personne prostituée supporte en se dissociant de son corps.
- L’entrée dans la prostitution résulte d’une absence de choix, et conduit à un enfermement progressif.
Un collectif d’hommes, de toutes origines, regroupés dans ce combat laïc et républicain, vous demande de voter le texte de loi qui vous est proposé ce 6 décembre pour toutes les bonnes raisons énoncées par son rapporteur :
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- Mettre fin à des mythes sans fondement.
- Sortir de l’anomalie qui consiste à éviter de considérer comme un problème ce qui est une violence grave.
- Lutter plus efficacement contre la traite des êtres humains en s’attaquant aussi à la prostitution qui y contribue.
- Changer de coupable en pénalisant celui qui contribue à la dégradation de la personne prostituée par la dépossession de son corps, physique, psychique et symbolique.
- Remédier à cette incohérence avec nos principes fondateurs de liberté, d’égalité et de fraternité.
- Donner une réponse adéquate à ce problème comme vous l’avez fait précédemment dans cette assemblée contre l’esclavage, contre la peine de mort, pour le droit à la contraception et à l’avortement, en construisant ainsi une société plus démocratique, plus égalitaire, dotée d’un cadre plus efficace pour lutter contre les violences sexuelles.
Il s’agit de donner toute sa place à une liberté véritable, la liberté d’avoir le choix, la liberté de disposer de son corps sans abuser du corps d’autrui, la liberté de pouvoir vivre sans avoir besoin de se prostituer.
Le réseau Zéromacho réunit des hommes partisans de la liberté sexuelle et du respect de l’autre. Il a pour ambition de regrouper les 90 % d’hommes qui ne payent pas pour la prostitution, parce qu’ils sont contre la marchandisation du corps et qu’ils préfèrent avoir des relations sexuelles dans la réciprocité des désirs.
Nous sommes convaincus que la dissuasion de la demande, passant par une pénalisation graduée des clients-prostitueurs est, comme pour beaucoup de lois contre les violences, l’un des éléments indispensables d’une politique globale de prévention, sans lequel aucune loi ne sera appliquée. Sans une démarche efficace de dissuasion, la prostitution ne pourra que continuer à se développer.
Si la prostitution peut sembler lointaine, si pour certains elle n’est pas un problème, c’est parce que nos proches y sont rarement impliqués. La banalisation actuelle de la prostitution chez des jeunes, lycéens et étudiants, à une époque où la précarité s’aggrave, devrait pourtant interpeller tous les citoyens.
Nous appelons les hommes, qui sont contre le système prostitueur, qui refusent sa banalisation, à écrire dès aujourd’hui à leur député-e en ce sens.
Mesdames, Messieurs, en votant cette proposition de loi, vous contribuerez à faire prendre conscience à l’opinion publique des réalités violentes de la prostitution, et vous mettrez en place une politique efficace pour la combattre.
Le 2 décembre 2011,
Gérard Biard, Patric Jean et Frédéric Robert,
Responsables du réseau Zéromacho
La résolution a été adoptée à l’unanimité par les députés français le 6 décembre 2011.
Le réseau Zero Macho a été mentionné à l’Assemblée Nationale, par la députée du Calvados, Laurence Dumont, lors du débat sur le projet de résolution contre la prostitution :
« Pour conclure, je vous citerai un extrait du manifeste d’un collectif d’hommes regroupés dans un combat laïc et républicain, le réseau ZéroMacho. Voter ce texte permettra, disent-ils “de donner toute sa place à une liberté véritable, la liberté d’avoir le choix, la liberté de disposer de son corps sans abuser du corps d’autrui, la liberté de pouvoir vivre sans avoir besoin de se prostituer.” »
http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2011-2012/20120078.asp#INTER_16