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Action 37

Action #37 – Sénat : blocage et sabotage

La proposition de loi contre le système prostitutionnel, votée à l’Assemblée nationale, tarde à être inscrite à l’ordre du jour du Sénat. Pour ses opposants, tous les moyens sont bons.

Le 20 mai 2014, la commission spéciale du Sénat auditionnait le Suédois Simon Häggström, inspecteur chef de la brigade anti-prostitution de Stockholm et témoin capital pour juger de quinze années d’application de la loi pénalisant les clients-prostitueurs.

Zéromacho est en mesure de démontrer que le compte rendu de son intervention a été tronqué et falsifié sur plusieurs points importants.

En résumé :

Les trois arguments centraux pour s’opposer à la pénalisation des « clients » sont

L’inspecteur Häggström démontre le contraire par l’exemple suédois et c’est justement là que ses propos sont coupés ou déformés

Zéromacho demande que le texte intégral de l’audition de Simon Häggström soit rétabli sur le site du Sénat et distribué aux membres de la commission spéciale.

 

Les éléments du témoignage qui ont été mutilés :

Premier argument : l’inspecteur affirme (vidéo à 30’) :

« Les femmes prostituées disent que la Suède est un pays plus sûr que les autres. Beaucoup ont vendu du sexe avant, dans d’autres pays européens, et elles disent que les Suédois qui viennent les voir ont très peur, parce qu’ils savent que la police les recherche, et savent qu’il faut qu’ils se conduisent bien parce que s’ils se conduisent mal, la femme peut appeler la police sans être punie, sans encourir aucune pénalité.»

Or le compte rendu du Sénat édulcore fortement cette information capitale en traduisant comme suit :

« Inversement la Suède passe pour un pays plus sûr pour les femmes prostituées, notamment parce qu’elles savent qu’elles peuvent se plaindre à la police et que les clients le savent aussi.»

Le propos essentiel de l’inspecteur Häggström est totalement réduit. Finie « la peur » des clients, escamotée leur attitude moins agressive, envolé le témoignage des femmes prostituées ! Il ne reste qu’une vague impression : à l’étranger, « la Suède passe pour… ».

Deuxième argument (22′) :

L’inspecteur nous dit à propos des mythes répandus : « Une critique est que la loi conduira les clients vers d’autres pays : c’est en partie vrai, car 70 % des clients disent que leur achat précédent s’est fait dans un autre pays. Mais c’est la preuve que la loi marche parce que les Suédois n’osent pas acheter du sexe en Suède. C’est pour cela qu’il faut que plus de pays adoptent cette législation ou une législation similaire. »

Or le compte rendu donné à la commission déforme le propos et opère un retournement de sens :

 « les clients déclarent à 70 % que leur précédent achat de services sexuels avait eu lieu à l’étranger, mais cela ne doit pas dissuader un pays d’agir comme il lui semble juste »

On a effacé la « preuve que la loi marche», fait disparaître les « Suédois qui n’osent pas acheter de sexe » et surtout enlever cette incitation des autres pays à « adopter cette législation ou une législation similaire ».

A la place, chaque pays doit « agir comme il lui semble juste ».

Troisième argument (16’35 ») :

Un mythe a été répandu en France sur la future loi : il serait impossible de prouver la culpabilité des « clients » de la prostitution.

L’inspecteur témoigne du fait que : « 8 clients sur 10 admettent le crime immédiatement sur les lieux d’arrestation. Sans même que nous ayons eu à les conduire au poste de police. ».

Le compte rendu traduit : « Le client peut reconnaître les faits, ce qui arrive dans la plupart des cas ».

L’argument est, pour le moins, amoindri.

Pour vérifier par vous-même :

Vidéo de l’intervention de M. Simon Häggström, chef de la brigade anti-prostitution de Stockholm, Suède :

http://videos.senat.fr/video/videos/2014/video22850.html

Compte rendu donné par la commission spéciale du Sénat :

http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20140519/cs_prostitution.html

Suite à cette interpellation de Zéromacho :

– lire « Bidouillages au Sénat », par Gérard Biard, dans Charlie Hebdo du 29 octobre 2014:

Contrairement à l’idée communément admise, les pensionnaires du Sénat ne passent pas leur temps à ronfler. Si le projet de loi sur la lutte contre la prostitution, adopté depuis bientôt un an par l’Assemblée nationale, n’a toujours pas été inscrit à l’ordre du jour, cela ne signifie pas pour autant que les sénateurs s’en désintéressent. En juillet dernier, la Commission spéciale sur la lutte contre le système prostitutionnel avait d’ailleurs fait sauter la mesure la plus emblématique, la pénalisation du client, à la grande joie d’Esther Benbassa, sénatrice écologiste très attentive à la préservation des ressources alimentaires du maquereau. Et si l’on a la curiosité d’aller consulter les documents relatifs aux travaux de ladite commission sur le site du Sénat, on découvre qu’ils ont parfois donné lieu à une intéressante activité de réécriture.
Penchons-nous sur l’audition de l’inspecteur Simon Häggström, chef de la brigade antiprostitution de Stockholm, venu témoigner des résultats, 15 ans après l’adoption de la loi criminalisant l’achat de services sexuels, de ce fameux « modèle suédois » qui, aux dires des défenseurs du libre marché aux esclaves, « ne fonctionne pas ». Lui est venu expliquer, expérience à l’appui, qu’au contraire il fonctionne, et que « la traite et la prostitution ne sont plus un problème en Suède aujourd’hui ». Affirmation pour le moins capitale dans le débat, mais qui, si elle est évidemment présente dans l’enregistrement de son intervention (1), a disparu du compte rendu écrit (2) destiné à servir de document de travail à tous les sénateurs quand la loi sera débattue en séance. Et ce n’est pas le seul élément de son témoignage ayant subi des modifications allant un poil au-delà de la simple démarche consistant à résumer ses propos.
Simon Häggström souligne d’abord que cette loi est « l’outil le plus précieux » pour lutter contre la prostitution et les réseaux de proxénétisme. Dans le compte-rendu, la loi devient « le principal outil », ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Puis, il dément, par les faits, plusieurs arguments des opposants à la pénalisation. Concernant l’objection selon laquelle il serait impossible de prouver la réalité du délit, il témoigne que « 8 clients sur 10 admettent le crime immédiatement sur les lieux de l’arrestation, sans même que nous ayons eu à les conduire au poste de police ». Ce qui devient à l’écrit : « le client peut reconnaître les faits, ce qui arrive dans la plupart des cas ».
Plus loin, il répond à la critique classique : la loi conduira les clients vers d’autres pays. « C’est en partie vrai, admet-il, car 70 % des clients disent que leur achat précédent s’est fait dans un autre pays. Mais c’est la preuve que la loi marche parce que les Suédois n’osent pas acheter du sexe en Suède. C’est pour cela qu’il faut que plus de pays adoptent cette législation ou une législation similaire ». Une démonstration absente du compte rendu, qui lui fait dire : « les clients déclarent à 70 % que leur précédent achat de services sexuels avait eu lieu à l’étranger, mais cela ne doit pas dissuader un pays d’agir comme il lui semble juste »…
Quant à l’inévitable débat sur la sécurité des prostituées, que la loi compromettrait, Simon Häggström est formel : « Les femmes prostituées disent que la Suède est un pays plus sûr que les autres. Beaucoup ont vendu du sexe avant dans d’autres pays européens et elles disent que les clients suédois qui viennent les voir […] savent […] que s’ils se conduisent mal, la femme peut appeler la police sans être punie, sans encourir aucune pénalité ». Information qui devient : « la Suède passe pour un pays plus sûr pour les femmes prostituées […] ». Le témoignage direct des principales concernées se transforme en vague réputation, qu’on invite à mettre en doute…
Certes, l’intention de faciliter la tâche des sénateurs en les guidant dans leur vote est louable. Mais est-elle vraiment compatible avec les règles démocratiques ?
1 – http://videos.senat.fr/video/videos/2014/video22850.html
2 – http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20140519/cs_prostitution.html